La FSU Alsace ne partage pas la sérénité de Monsieur Faron, recteur de notre académie, au sujet de cette rentrée. Les remontées des écoles et des établissements nous montrent que de la maternelle au lycée les difficultés d’avoir un·e enseignant·e dans chaque classe sont bien là.
Dans le premier degré, le recours aux personnels sur liste complémentaire (39) ne suffit pas à résorber le manque d’enseignant·es. L’embauche de contractuel·les (55 en cursus monolingue ; 74 en cursus bilingue) ne le permettra pas non plus. Déjà, la brigade de remplacement est largement mobilisée. On le sait : tou·tes les enseignant·es absent·es ne pourront pas être remplacé·es. Durant cette année scolaire encore, les élèves risquent de perdre des centaines d’heures de cours. Pour le SNUipp-FSU, il est nécessaire d’organiser un concours de recrutement exceptionnel au niveau licence afin d’anticiper la crise qui reste encore à venir et afin de former au plus vite des professionnel.les de l’enseignement. Enseigner est un métier qui s’apprend.
Dans le 2nd degré, le bilan de rentrée est, lui aussi chaotique, à des degrés divers selon les établissements.
Dans les collèges, le principal problème est celui des effectifs. Les classes à plus de 30 élèves ne sont plus l’exception (les difficultés de scolarisation des élèves dans ces classes sont encore accentuées quand des élèves en inclusion y sont accueillis). C’est le cas dans plus de la moitié des 20 collèges pour lesquels nous avons eu des retours dès la rentrée. Et ce, malgré quelques ouvertures de classes en juillet sous la pression notamment de la mobilisation des collègues. Parfois les augmentations du nombre d’élèves dans l’établissement ne sont pas prises en compte pour abonder la dotation en personnels administratifs et de vie scolaire. C’est le cas notamment au collège Hans Arp où les collègues étaient massivement en grève avec le SNES-FSU, le vendredi 02/09 pour réclamer la création de postes de CPE et d’AED.
Dans les lycées, les problèmes concernent certains emplois du temps. C’est le résultat de la réforme « Blanquer » qui se conjugue à une affectation tardive des personnels. En effet, des nominations d’enseignants ont eu lieu au cours de l’été, voire à quelques jours de la rentrée, plaçant les collègues dos au mur pour préparer leurs cours.
Dans les collèges et lycées, le recrutement de personnels non titulaires – dont certains sont toujours en attente de leur contrat – a certes permis de limiter le nombre de classes sans professeur mais des postes n’étaient pas pourvus à la rentrée. C’est le cas encore en langues, notamment allemand, technologie, dans l’enseignement bilingue mais des tensions apparaissent aussi en lettres. Les vacances de postes (liées, notamment aux démissions et à la crise du recrutement) concernent surtout d’autres personnels que les enseignants, en premier lieu les PSY-EN et les AESH, mais également des AED, infirmiers scolaires, assistants sociaux.
Les annonces du ministre sur une potentielle revalorisation, dont une partie sera liée à l’élaboration de projets innovants, ne régleront en rien ni la crise de recrutement ni les départs toujours plus nombreux de l’Education Nationale (plus de 70 démissions dans le 1er degré dans l’Académie : 31 PE, 4 PES, 9 contractuels, 3 RC). Les moyens supplémentaires qui seraient accordés à ces écoles, risque de conduire à l’instauration d’une école à plusieurs vitesses et d’accentuer les inégalités scolaires.
La FSU Alsace s’inquiète des répercussions de cette situation sur les élèves, en particulier sur celles et ceux issu·es des milieux défavorisés. Les élèves ont, en trois années de crise sanitaire, perdu un grand nombre d’heures d’enseignement, il n’est pas acceptable que cette situation perdure par manque de personnels. Dans le même temps, le ministère poursuit à marche forcée l’instauration « de la culture de l’évaluation » (des élèves, des écoles et établissements) engendrant un stress supplémentaire inutile pour tous·tes et instaurant de fait une mise en concurrence des établissements entre eux.
Tout cela concourt à la dégradation constante du service public d’éducation, ce que dénonce depuis longtemps la FSU.
La situation des élèves en situation de handicap, nous inquiète aussi beaucoup. Ils sont très nombreux à avoir des notifications pour des établissements médicaux éducatifs mais ne pourront être accueilli·es faute de place. Beaucoup de structures sont saturées. Quant à celles et ceux qui doivent bénéficier d’accompagnement par des AESH, nous savons d’ores et déjà qu’elles et ils ne pourront pas tout·tes être accompagné·es faute de personnels. Le chiffre de 90% de taux d’accompagnement peut sembler très satisfaisant. Mais c’est un trompe-l’œil.
La dégradation d’un service public de qualité et des conditions de travail de ses personnels touche non seulement le 1er, 2nd degré et l’Université mais aussi les personnels administratifs, techniques, sociaux et médicaux.
Les problèmes de recrutement, la multiplication des demandes de ruptures conventionnelles, les démissions témoignent, ici aussi, des difficultés des conditions d’exercice des métiers. Elles sont exacerbées par les suppressions de postes, le refus du ministère de reconnaître le rôle et l’expertise des agents en les excluant de certaines primes (ex : les infirmières scolaires et Psychologues de l’Education nationales ne touchent pas le Ségur) et l’obligation de prendre en charge de nouvelles missions faute de personnels suffisants (ex : les infirmières scolaires palliant au manque de médecins scolaires et assistants sociaux).
Alors que le ministère avance dans ses projets qui menacent le statut, les missions et le métier des personnels administratifs, techniques, sociaux et médicaux, la FSU et ses syndicats le SNASUB-FSU et le SNICS-FSU en revendiquent l’arrêt, et demandent la continuation du plan de requalification de la filière administrative, et son extension à la filière ITRF.
L’Université de Strasbourg souffre de trois maux. Le premier est ancien et chronique, les deux autres sont récents et risquent d’être fulgurants. La longue souffrance de l’Université de Strasbourg et de ses personnels est le manque cruel de moyens humains et financiers dans une période où le nombre d’étudiants croît de manière exponentielle. Le SNESUP-FSU a tant documenté cette pathologie que nous n’y revenons pas. Elle est encore aggravée par le contexte géopolitique et la crise économique.
Il convient en cette rentrée de mettre l’accent sur deux nouvelles pathologies dont les symptômes deviennent criants. Tout l’abord l’hémorragie des cadres intermédiaires et supérieurs dans les services centraux. Les conditions de travail dégradées, le développement des emplois précaires et le manque d’attractivité salariale pousse nombre de personnels titulaires vers le privé ou d’autres services publics plus attractifs. Si l’université est affaiblie dans ses fonctions support, elle risque tout simplement de s’effondrer, comme l’Hôpital.
La dernière pathologie dont souffre l’université est la quête de rentabilité par tous les moyens possibles. Cette maladie est certes ancienne – elle remonte au moins à la LRU -, mais ses symptômes les plus graves se manifestent maintenant. Ils risquent de la terrasser très rapidement. De quoi s’agit-il ? L’Université de Strasbourg est soumise par sa présidence à une stratégie d’utilisation des moyens de service public qui vise à développer des filiales à des fins de rentabilité. Cette stratégie est un échec retentissant. Des dizaines de millions d’euros d’investissement annuels manquent aux missions d’enseignement et de recherche, et la rentabilité des investissements reste désespérément absente. Après des démissions massives dans les conseils centraux en 2020, il faut en effet s’alarmer aujourd’hui de l’accumulation des échecs comme celui de l’usine école EASE, des dysfonctionnements comme celui de l’IGBMC, et des gestions douteuses comme celles de SILABE, de l’USIAS, de l’IRCAD et de l’IHU, dont le directeur général a été démis de ses fonctions après avoir fait un signalement au parquet financier. A cela s’ajoute la démission du directeur de l’École de Management pour un différend financier. Par un courriel à tous les personnels, le 25 juin 2020, Michel Deneken annonçait qu’« Un prochain rapport de gestion de la Cour des Comptes est attendu […] Quel que soit son contenu, je le communiquerai ». On comprend pourquoi cet engagement n’a pas été tenu.
Le déclassement salarial accentue encore les difficultés des agents des services publics. Ce ne sont pas les mesures gouvernementales prises cet été (augmentation du point d’indice de la fonction publique de 3,5%) qui compenseront les pertes subies durant 10 années de gel de la valeur du point d’indice, ni qui permettront aux agent·es de retrouver un sens à leur métier au service du public
Le gouvernement doit poser des actes concrets d’amélioration des conditions d’exercice de tous les métiers de l’Education et de leur revalorisation « sans contrepartie ».