La grève unitaire du 18 octobre contre la réforme des lycées professionnels d’Emmanuel Macron a constitué un premier temps fort révélateur de l’opposition des PLP à ce projet. Depuis, des initiatives et des actions locales se poursuivent dans les établissements pour continuer à construire et à amplifier les mobilisations, notamment par une nouvelle journée de grève intersyndicale le 17 novembre.
Plutôt que d’entendre les critiques légitimes des personnels, Carole Grandjean persiste en organisant des pseudo–concertations pour tenter de faire valider son projet par des représentant·es de la profession – les autres invités à « débattre », branches professionnelles, chefs d’entreprises, recteurs, représentants de Région, étant acquis à sa cause.
Le SNUEP–FSU n’est pas dupe de cette manœuvre grossière. En ne participant pas à ce simulacre de discussion, il s’engage à porter haut et fort l’intérêt, la parole et les revendications des PLP qui exigent le retrait de ce projet dévastateur pour l’avenir des jeunes et de l’ensemble du système éducatif. Aucune nouvelle réforme ne peut être mise en œuvre sans qu’un état des lieux rigoureux et objectif n’ait été préalablement réalisé en prenant en compte l’expertise des personnels. Ces pseudo–concertations traduisent une conception du dialogue social irrespectueuse des personnels et de leurs organisations syndicales représentatives. Elles ne poursuivent qu’un seul objectif : détruire nos formations, nos métiers, nos statuts et nos lycées professionnels.
LA DÉCISION EST PRISE ET ÉCRITE
Mettre en place des concertations, c’est normalement initier des échanges et des débats visant à préparer une prise de décision. Or, dans le document « Ensemble, construisons le lycée professionnel de demain » (À consulter ici) qui sert de base aux discussions, la décision est déjà prise et écrite page 9 : « la transformation de la voie professionnelle, déjà engagée sous le précédent quinquennat doit être renforcée pour aller plus loin, dans une réforme qui se veut structurelle » ou encore « la réforme des lycées professionnels sera installée progressivement sur
le quinquennat à compter de la rentrée scolaire 2023 ». Drôle de conception du dialogue social ! La méthode ne change pas ! Pour la ministre, se concerter c’est s’accorder pour valider sa réforme.
Suite à la construction d’une unité syndicale inédite et aux grèves réussies, la communication de la ministre semble s’être « adoucie ». Cependant, les éléments socles annoncés à toutes les organisations syndicales comme non négociables font toujours partie du projet. Dans son édito page 3, Carole Grandjean écrit clairement que les groupes de travail doivent échanger sur : « augmenter progressivement les PFMP, ajuster la carte des formations, adapter les organisations pédagogiques, donner aux lycées professionnels les moyens d’adapter leur projet d’établissement aux réalités locales … » Le seul recul patent de la ministre est d’introduire la notion de progressivité sur l’augmentation des stages. Ce petit pas en arrière ne peut constituer une raison d’entrer en discussion car ce que demandent les personnels, c’est plus de temps disciplinaires dans les établissements pour faire réussir tous les élèves et certainement pas davantage de stages. De plus, adapter les volumes disciplinaires par établissement revient à faire exploser les grilles horaires nationales. En renvoyant aux réalités locales l’organisation des formations, le gouvernement choisit de remettre en cause l’accès à une formation nationale pour les élèves et d’éclater un des piliers de l’école Républicaine : l’égalité entre les élèves.
UNE MÉTHODE ET UNE STRUCTURATION AUTORITAIRE DES ÉCHANGES
Afin d’accroître une prétendue efficience des groupes de travail (comprendre : « comment légitimer collectivement les éléments socles de ma réforme »), la ministre propose des pistes pour ces concertations « comment ouvrir davantage les lycées professionnels à ses partenaires, comment augmenter les semaines de PFMP, comment lever les freins au développement de l’apprentissage… »
Un calendrier extrêmement contraint
Si dorénavant la ministre s’accorde à parler de progressivité de mise en œuvre, elle n’en rabat pas sur l’augmentation des périodes de stages. Pire, elle annonce page 8 un calendrier encore plus rapide avec « le lancement de travaux et expérimentation de sa réforme des début 2023 ». Il est fort à craindre que des lycées pros « pilotes » avec des équipes de direction dociles tentent d’imposer ces expérimentations aux personnels. Le SNUEP –FSU appelle tous les collègues qui se retrouveront dans cette situation intenable à contacter les militant·es locaux ou
nationaux du SNUEP–FSU.
Un bilan tronqué et non partagé de la Transformation Blanquer de la voie pro (TVP)
Le SNUEP–FSU exige un état des lieux rigoureux et objectif de la réforme précédente de façon à identifier les difficultés précises pour les élèves et les personnels de lycées pros avant toute prise de décision. La ministre en a évidemment décidé autrement et présente page 6 et 7 son bilan unilatéral. Les intertitres auraient de quoi faire « rire » tous les PLP si ce bilan n’était pas un nouvel instrument de la casse organisée de nos lycées pros : « des innovations pédagogiques structurantes, des résultats encourageants »… Pire, selon elle, « les enseignants se sont emparés du chef–d’œuvre qui reçoit de bons retours des élèves investis » ou encore sur le mixage des publics (élèves–apprentis), « En terminale, l’adaptation du rythme des PFMP pour s’aligner sur celui de l’alternance démontre une réflexion particulièrement riche sur le sujet ».
Concernant les secondes familles de métiers, il est affirmé qu’ « elles permettent de valoriser des organisations de formation qui ont su démontrer leur efficacité dans la lutte contre le décrochage et la construction des parcours » sans aucune statistique à l’appui. Ce nouveau ministère semble parfaitement manier la prophétie et l’auto–satisfecit !
Pourtant, selon le sondage Harris Interactive de mars 2022 pour le compte du SNUEP–FSU, les PLP jugent sévèrement la TVP. Les dispositifs sont massivement rejetés et responsables de la dégradation des conditions d’étude des élèves et des conditions de travail. Trois quarts des PLP estiment que le nombre d’heures de cours est insuffisant pour faire réussir les élèves.
Alors que la double finalité du baccalauréat est toujours inscrite dans le code de l’éducation, le dossier dit clairement page 7 « l’objectif de l’insertion professionnelle est pourtant la vocation même du diplôme professionnel ».
Est–ce à dire que ces hauts fonctionnaires ne respecteraient pas les textes législatifs ? Est–ce la confirmation explicite du renoncement de l’ambition scolaire du ministère de l’éducation nationale pour un tiers de la jeunesse lycéenne la plus fragile scolairement et économiquement ?
Ce bilan tronqué se termine évidemment par une conclusion révélatrice de l’esprit de ces concertations et qui n’a même pas besoin de commentaires, « désormais, doit donc se mettre en œuvre une réforme structurelle pour la réussite de tous les élèves ». Les PLP apprécieront.
Pour le SNUEP–FSU, les conditions ne sont pas réunies pour des concertations sereines et efficaces.
En tant qu’organisation syndicale représentative des PLP, le SNUEP–FSU défend les droits des personnels et porte un projet éducatif ambitieux pour tous les élèves.
Ces concertations portent en leur sein tous les dangers de la réforme.
Le cadre et les éléments socles qui ont généré une opposition forte des PLP restent présents et les euphémisations de certaines formulations ne sauraient les duper.
C’est pourquoi le SNUEP–FSU appelle les collègues à poursuivre les actions pour amplifier la grève du 17 novembre et exiger le retrait de ce projet de réforme.
L’intersyndicale SNUEP-FSU, CGT Educ’action Alsace, UNSA, SUD Education Alsace, SNETAA FO appelle à un rassemblement jeudi 17 novembre à 14h00 devant le rectorat, rue de la Toussaint.