Je suis AESH : accompagnant·e d’élèves en situation de handicap. Mes missions sont fondamentales pour l’accompagnement et la réussite de ces élèves, pour l’acquisition de leur autonomie lorsqu’elle est possible, pour compenser au mieux les conséquences de leur handicap dans la vie quotidienne et pour les soutenir dans les apprentissages scolaires.
Actuellement, un personnel sur dix de l’Éducation nationale est AESH, soit près de 110000 agent·es qui accompagnent les élèves tout au long de leur scolarité.
Depuis quatorze ans, depuis la loi « pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées » du 11 février 2005, l’État annonce une société inclusive et le Ministère de l’Éducation une École inclusive. Le bilan aujourd’hui est amer pour les élèves et pour nous AESH.
Nos contrats demeurent précaires et notre rémunération indécente.
Nous sommes majoritairement des femmes, à plus de 90%, âgées de 45 ans en moyenne, parfois seules avec enfants, en CDD ou CDI, avec des temps incomplets toujours imposés, la plupart du temps 62% d’un équivalent temps plein (soit 24h par semaine). Un·e AESH à temps complet est recruté·e au SMIC avec un salaire tellement faible que la grille indiciaire doit être constamment révisée pour ne pas être sous la valeur du SMIC.
Pire, même avec les nouveaux décret et arrêté parus ce 23 août 2021, le salaire moyen mensuel brut d’un·e AESH au premier contrat est de 973 € en raison des temps incomplets imposés (majoritairement 62%) et donc sous le seuil de pauvreté. Aujourd’hui, un·e AESH recrutée à 62% de temps partiel imposé devra travailler entre 9 et 12 ans pour dépasser le seuil de pauvreté actuel (1063 €), sans compter la question de l’inflation. Il faut dire que même avec la nouvelle grille indiciaire qui doit être appliquée au mois de septembre 2021, la perspective de progression de salaire sur 30 ans de carrière pour des contrats à 62% n’est que de 290 € bruts mensuels !
Quant aux autres questions salariales, les AESH sont les grand·es oublié·es de l’Éducation ! Toujours pas de primes REP et REP+ (Réseaux d’Éducation prioritaire), pas de prime Covid, pas de prime d’équipement informatique, des surcoûts d’assurance complémentaire (jusqu’à 30%) pour les déplacements professionnels qui ne sont pas pris en charge par l’employeur.
Les retards de traitement pour la mise en place des grilles indiciaires, de l’indemnité compensatrice de la CSG, de l’indemnité différentielle au SMIC, … se succèdent. L’absence de subrogation avec la MGEN ou la CPAM génère des trop-perçus difficiles à rembourser avec, de plus, des découverts et des frais bancaires lors des prélèvements, mais aussi d’autres difficultés financières lors du versement des indemnités journalières avant remboursement : changement de tranche d’impôt, perte de l’ARE, perte de la Prime d’activité…
Aujourd’hui, en 2021, les AESH demeurent donc précarisé·es, mal payé·es et malmené·es. !
La mise en place des Pôles inclusifs d’accompagnement localisés (PIAL), tels qu’ils sont organisés et gérés, est très loin de stabiliser les accompagnements des élèves.
Leur généralisation acte la dégradation de la qualité de l’accompagnement pour les élèves et la dégradation des conditions de travail pour les AESH. Le PIAL n’est qu’un outil d’optimisation de gestion des AESH.
- Les accompagnements sont de plus en plus mutualisés et par conséquent et le nombre d’heures d’accompagnement par élève se réduit.
- Les modifications d’emploi du temps et/ou d’affectations des AESH en cours d’année posent nombre de problèmes d’organisation professionnels et personnels (transports, frais de déplacement, problème de garde d’enfants dont en crèche, cumul d’activités pour compléter le salaire, …). De plus, ces changements se font la plupart du temps sans concertation et sans délai de prévenance.
- Les affectations sur plusieurs écoles et établissements se multiplient.
- Si nos salaires sont à temps incomplets, notre emploi du temps lui est pourtant bien complet en raison des contraintes des emplois de temps des élèves accompagné·es.
Il est donc urgent
d’augmenter les rémunérations de toutes et tous les AESH et sur toute la carrière,
de garantir la possibilité de contrats à temps complets pour vivre dignement,
d’abandonner les PIAL et la politique de mutualisation des moyens,
de créer un véritable statut de la Fonction publique catégorie B pour reconnaître le métier d’AESH,
de recruter massivement des AESH pour permettre aux élèves ayant des notifications d’être accompagné·es à la hauteur de leurs besoins.