Grève du 19 octobre et actions organisées par la FSU
Après de premières timides avancées suite aux mobilisations et à l’action syndicale, les AESH se sont mobilisé·es à l’appel des syndicats pour leur salaire, leur statut, leur conditions de travail et leur recrutement à hauteur des besoins. La mobilisation était importante partout en France.
A Strasbourg, un stage syndical organisé par le SNUipp-FSU 67 a eu lieu avec la présence d’une dizaine d’AESH.
Les revendications de réelle revalorisation salariale, de création d’un corps de fonctionnaires et d’amélioration des conditions de travail, notamment par l’abandon des PIAL, n’ont toujours pas de réponses concrètes.
Si l’action syndicale a permis que toutes les années d’AESH ou d’AED-AVS soient prises en compte lors du classement dans la nouvelle grille, ce n’est pas le cas des années sous contrat aidé (CUI CAE – PEC). Les discussions sur le temps de travail des AESH ré-ouvertes, le ministère avance des pistes inacceptables pour faciliter l’accès à des emplois à temps complet. La multiplication des contrats auprès de plusieurs employeurs, en dehors du temps scolaire, ne répond en effet ni aux attentes des AESH ni à leurs missions. Pire cela participe de la non reconnaissance d’un métier et des personnes qui l’exercent.
Quant aux PIAL, leviers de mutualisation des moyens, ils dégradent les conditions de travail des AESH en leur imposant de suivre davantage d’élèves et d’intervenir sur plusieurs écoles, collèges et lycées.
Alors les organisations FSU, FNEC-FP-FO, CGT Éduc’action, SNALC, SUD éducation, SNCL-FAEN jugent nécessaire de poursuivre et d’amplifier la mobilisation pour :
- augmenter les rémunérations des AESH sur toute la carrière, avec comme objectif l’alignement sur la grille de catégorie B ;
- leur garantir la possibilité de contrats à temps complet pour vivre dignement de leur travail ;
- abandonner les PIAL et la politique de mutualisation des moyens ; créer un véritable statut de la Fonction publique pour reconnaître le métier d’AESH ;
- donner accès à des formations qualifiantes à hauteur des missions d’inclusion ;
- recruter les AESH qui font encore défaut pour permettre aux élèves en situation de handicap de bénéficier d’un accompagnement à hauteur des besoins.
Nous avons décidé à l’issue de stage d’écrire à nos députés et de leur envoyer le bilan de l’enquête sur les conditions de travail des AESH dans le Bas-Rhin.
Mobilisation des « oubliés de l’Éducation nationale »
Article DNA du 19 octobre 2021
Par Catherine CHENCINER
À l’occasion d’une mobilisation nationale, le Snuipp-FSU a proposé aux AESH (accompagnants d’élèves en situation de handicap) non pas une manifestation, mais un stage syndical pour « discuter de leurs problématiques » en termes de conditions de travail, de statut professionnel, d’indice salarial… Ils étaient 21 à Mulhouse et 12 à Strasbourg.
Aucun ne changerait de travail, mais tous revendiquent que l’accompagnement d’élèves en situation de handicap soit enfin considéré comme un « vrai métier ». « On se sent en empathie avec les élèves. On est là pour eux et c’est une richesse pour nous aussi », témoignent Mélodie Dinane et Sihem Boussiala, deux des 21 AESH rassemblés ce mardi 19 octobre dans un lycée de Mulhouse, à l’occasion d’un appel national à la mobilisation, sous la bannière commune CGT éduc’action, FNEC-FP-FO, FSU, SNALC, SNCL-FAEN, SUD éducation.
Comme à Strasbourg, le Snuipp-FSU leur a proposé non pas une manifestation, mais un stage d’information syndical pour « discuter de leurs problématiques » en termes de conditions de travail, de statut professionnel, d’indice salarial… Tout aussi enthousiaste que ses collègues, Gwénaël Santerre calcule qu’il lui « manque 200 euros à la fin de chaque mois ». « Si je ne touchais pas un complément en tant que travailleur handicapé, je ne pourrais pas en vivre. » Contractuel depuis 2009, embauché à durée indéterminée depuis 2014, il a actuellement un planning pour le suivi de quatre élèves scolarisés de l’élémentaire au collège, dans plusieurs établissements privés de Mulhouse. Soit 28 heures de travail hebdomadaire pour un salaire mensuel inférieur à 900 euros, l’augmentation accordée aux AESH à la rentrée, « une aumône de 20 à 30 euros », ne pouvant suffire.
Ses collègues approuvent, Mélodie Dinane, en poste depuis janvier dans le Sundgau, étant en plus auto-entrepreneure dans le bien-être. Quant à Sihem Boussiala, AESH depuis 13 ans, elle peut compter sur « un conjoint qui travaille ». Rattachée au Pial (Pôle inclusif d’accompagnement localisé) du collège Pfeffel de Colmar, elle partage son temps entre cet établissement et le lycée Blaise-Pascal. « Je dois courir pendant les récréations, sans avoir jamais de pause. Maintenant, on peut nous demander d’une heure à l’autre d’aller remplacer un collègue dans un autre établissement, sans connaître l’enfant ça peut être compliqué », expose-t-elle.
Nouvelle gestion mutualisée
Une nouvelle gestion mutualisée des ressources humaines, déployée à partir de 2017, dont Gwénaël admet qu’elle peut être « plus en rapport avec les besoins du terrain », mais que le Snuipp-FSU dénonce comme une forme « d’uberisation de la fonction ». « Certains AESH sont sur 18 écoles sans frais de déplacement, ni de repas », s’indigne Valérie Poyet, secrétaire départementale de la FSU 68. En outre, « en étant envoyée à droite à gauche », Mélodie Dinane a du mal à se sentir pleinement intégrée dans une équipe éducative. « Si je suis au lycée d’Altkirch, je ne peux pas participer à des réunions fondamentales pour accompagner correctement un enfant malvoyant à l’école d’Hirtzbach. Alors qu’il y a des informations que je suis la seule à connaître, comme les couleurs qu’il vaut mieux utiliser », argumente-t-elle. Mise à la disposition de l’élémentaire, elle peut même être amenée à accompagner des élèves n’ayant pas de handicap, mais des difficultés comportementales ou scolaires, et qu’elle ne se verrait « pas refuser d’aider ».
Ainsi confrontés à de multiples taches « invisibles », des « conditions d’exercice changeantes », sans oublier une formation continue souvent effectuée sur le temps personnel, pour une rémunération à peine plus élevée que le Smic et une ancienneté qui n’est pas toujours reconnue, les AESH sont « en manque de reconnaissance ». « On est corvéables à merci, on n’a pas réellement de statut dans l’Éducation nationale, on est des oubliés », renchérit Sihem Boussiala.
« Il faut défendre ce métier, au vu de son importance, reprend Valérie Poyet. Dans le Haut-Rhin, il y a actuellement 1013 AESH sous contrat et, depuis la rentrée, 135 doivent être embauchés. Mais il y a toujours des démissions et de nouvelles notifications d’enfants. On ne peut pas dire qu’il faut à tout prix une école de l’inclusion sans s’en donner les moyens. »
Alerter par « une action concrète »
À Strasbourg, le Snuipp-FSU 67 a réuni 12 AESH du Bas-Rhin dans un lycée. « Nous avons travaillé sur leurs conditions de travail, présenté leurs contrats, ce à quoi ils ont droit. Nous avons aussi beaucoup discuté de la mise en places des Pial [Pôles inclusifs d’accompagnement localisés, NDLR] qui dégradent leurs conditions de travail », détaille Mélanie Christophel, chargée du dossier des AESH au syndicat.
Conditions de travail dont elle a présenté un bilan, à l’issue d’une enquête récemment réalisée en ligne par le Snuipp-FSU 67. « Ce qui en ressort, c’est que les Pial, en mutualisant les AESH, leur compliquent la tâche. Que ce métier est sous-payé et certains réclament une prime pour exercer en réseaux d’éducation prioritaire. Nous avons prévu d’en tirer un courrier que nous enverrons aux députés du Bas-Rhin pour les alerter. Il s’agissait de permettre aux AESH de se rencontrer, mais aussi d’aboutir à une action concrète. »
Strasbourg Handicap : les accompagnants en quête de reconnaissance
Article DNA du 19 octobre
Par
Les accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) étaient en grève partout en France, ce mardi 19 octobre. À Strasbourg, elles n’étaient que… deux à manifester devant le rectorat, pour revendiquer plus de considération et relayer les doléances de leurs collègues.
Elles adorent leur métier, mais n’arrivent pas à en vivre décemment, et se considèrent un peu comme « les invisibles de l’Éducation nationale ». Sous-payées, multitâches, précarisées et devant sans cesse « se battre pour des miettes », les AESH – accompagnant(e) s d’élèves en situation de handicap, ou… adultes en situation hypercompliquée, selon la manière dont on décline l’acronyme- étaient appelé(e) s à la grève ce mardi. Si des rassemblements étaient organisés partout en France, notamment dans la capitale, à Strasbourg, elles n’étaient que deux à manifester ce mardi matin devant l’antenne du rectorat, boulevard Poincaré.
À quand une considération à la hauteur de leur engagement ?
Au nom de plus de reconnaissance, d’une hausse des salaires, de l’abandon de la mutualisation et d’une considération qui soit à la hauteur de leur engagement. Et encore… Virginie Borrelly et Nathalie Croharé s’estiment plutôt chanceuses et bien loties, car soutenues tant par la directrice que par les enseignants de l’école où elles interviennent. Toutes deux exercent au sein de l’établissement privé Joie de vivre, à Koenigshoffen, « où l’ensemble des AESH s’est mis en grève ce mardi », précise Nathalie. Virginie y accompagne deux enfants (de deux niveaux différents) sur le temps scolaire, et donne parfois un coup de main à un troisième, à raison de 24 heures par semaine au total. « Au maximum, on peut aller à 28 heures en lycée ; mais en étant payé au SMIC horaire, si on est seule à travailler, ça ne suffit pas pour vivre ! », déplore celle qui exerce ce métier, que par ailleurs elle « adore », depuis trois ans. Nathalie, elle, a commencé il y a six ans par un CUI (Contrat unique d’insertion), est actuellement en CDD et ne se verrait plus faire autre chose…
Certes, toutes deux reconnaissent qu’il y a eu ces dernières années « quelques petites avancées ». Contractuelles, elles signent désormais des CDD de trois ans (au lieu d’un auparavant) et ont eu droit à 60 heures de formation à leur arrivée. Mais elles dénoncent le manque de perspectives d’évolution et la nouvelle organisation par Pôles inclusifs d’accompagnement localisés (Pial), chaque pôle regroupant plusieurs écoles. Une solution censée favoriser la coordination des ressources, mais dont les deux AESH considèrent qu’elle revient surtout à « une mutualisation forcée, qui aboutit à ce que certaines collègues accompagnent plusieurs enfants, de niveaux différents et avec des handicaps très divers, souvent sur plusieurs établissements ! » Ce qu’elles souhaiteraient, outre un salaire décent, c’est un réel statut. « La transformation des AESH en éducateurs scolaires spécialisés pourrait être une solution », estime ainsi Virginie, convaincue que l’inclusion scolaire ne peut fonctionner que si on y met les moyens. « Sinon, on va encore vers des inégalités sociales pas croyables ! », conclut-elle.